1 février 2009

Le prix Gaston Vignot pour les arts graphiques


L'année dernière j'ai proposé un apprenti (Jean-Baptiste Poveda - B58) pour "le prix Gaston Vignot pour les arts graphiques". C'est l'AMOPA qui organise ce prix. Il y a quelques jours j'ai appris que ce jeune homme recevait 300 euros. Je suis très content et je remercie l'AMOPA (Association des Membres de l'Ordre des Palmes Académiques). Pour ce prix il y a peu de travail à faire. Il faut choisir un apprenti méritant et faire son éloge. Ci-dessous l'éloge de Jean-Baptiste.

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Éloge de Jean-Baptiste Poveda.

Il y a de nombreuses manières pour parler de quelqu’un. Je vais choisir celle qui consiste à décrire une personne selon sa manière d’avancer dans la vie. Il y a des personnes qui avancent en critiquant tout et tout le monde. D’autres avancent en pleurnichant et en se posant à tout moment en victime. D’autres encore abusent de la séduction. Si tous ces cas de figure donnent malheureusement des résultats, ils ne produisent pas de belles personnes, tel est le fonctionnement de notre société. Jean-Baptiste obtient quant à lui de très bons résultats en avançant sans aucune fourberie et avec une étonnante tranquillité. Peu de mots, peu de questions, seul son regard interroge, et c’est cette réceptivité à son environnement qui le fait progresser. C’est une personne qui est, en fait, tout simplement présente, qui n’est pas dans une représentation avec d’interminables questions, qui n’est pas dans son rêve. Sa vie et ses difficultés, je ne les connais pas, elles restent, comme je le demande à tous, dans le couloir, devant la porte, hors de la classe et même hors de l’école. De cette manière Jean-Baptiste est complètement disponible pour apprendre. Il est allé très vite et beaucoup plus loin que je ne le pensais. Sa plus grande qualité c’est surement de ne pas agir. Je m’explique : pas de parole pour me perdre ou pour se perdre, pas de "je ne sais pas", "je ne comprends rien", pas de "je sais, je sais", pas de "ce n’est pas de ma faute" et pas de "il n’y a rien dans cet atelier", "on ne peut pas travailler". Il ne se précipite pas sur les machines croyant savoir et ignorant qu’il ne sait pas. C’est ainsi que, de sa non-action apparait une action juste, émergeant naturellement et sans erreur.

Pour apprendre la sérigraphie il a fait 6000 km, à son arrivée dans la métropole nous avons une première rencontre. C’est au bout de 2 ans qu’il trouve une entreprise pour l’accueillir et signe un contrat d’apprentissage. Cette entreprise ne correspond pas tout à fait à son attente. Peu importe Jean-Baptiste s’équipe d’un matériel de sérigraphie de base pour apprendre et continuer à comprendre à la maison. Au bout de quelques mois, il réalise des impressions professionnelles.

Il se renseigne au-delà de l’école et se crée un début de réseau, il va encore plus loin, apporte des solutions aux problématiques propres de l’atelier sérigraphie de l’école, et solutionne des problèmes qui me sont propres. Ce rayonnement, de moi, passe à toute la classe. Et, à ce moment, la situation s’inverse, c’est moi qui suis dans sa classe, c’est moi qui lui demande des renseignements et des conseils. Pour les autres apprentis, il est une véritable ressource, toujours disponible, il a toujours du temps pour les aider dans leur parcours.

Quelques informations que je donne suffisent pour que Jean-Baptiste construise quelque chose. Dans le plus grand calme, des choses nouvelles apparaissent. Il fait, il construit. Il ne calcule pas comment construire, il n’essaye pas de faire, il fait tout simplement. Il est de cette manière complètement en accord avec lui-même.
Ce quelque chose, c’est une machine, c’est un parcours pédagogique, c’est un fichier numérique, c’est un écran, c’est une image, c’est un motif sur un vêtement, c’est tout mon métier, la sérigraphie, que je vois se réinventer sous mes yeux.


Écrit le 11 avril 2008

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